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La crypto s’est effondrée. Bitcoin n’est toujours pas ce refuge contre l’inflation, et personne ne l’utilise comme moyen d’échange. L’Amérique et le dollar n’ont pas perdu de leur superbe. Les problèmes de sécurité se multiplient dans la DeFi et on se rend compte que certains protocoles ne sont pas aussi décentralisés que ce qu’on nous a vendu. Bref, on en vient naturellement à s’interroger sur la réelle utilité apportée par la crypto. Et si nous nous étions tous trompés depuis le départ ?
Si vous achetez un token au hasard, il est bien plus probable de tomber sur une arnaque ou un énième Ponzi que sur une marchandise avec une véritable utilité. Plusieurs années se sont écoulées et pour l’instant on a l’impression que les cas d’utilisation se résument à un pur jeu spéculatif.
« La valeur d’une idée dépend de son utilisation ». Thomas Edison
Pourtant, il ne convient certainement pas d’enterrer la crypto. Nous sommes encore dans une phase de balbutiement. La majorité des utilisateurs sont encore des early adopters.
Même si la crypto est une caricature comique de cette phase d’adoption, d’autres technologies précédentes ont connu les mêmes problèmes. Si vous téléchargiez les applications de distribution de bière sur l’iPhone de 2010, vous vous disiez que l’App Store n’avait rien de révolutionnaire.
En 2008, qui aurait pu imaginer une seconde que l’App Store accoucherait d’applications aussi géniales que Lime, Uber ou Instagram ?
Nous pouvons avoir la même impression aujourd’hui avec les photos de singes. Mais la crypto a réellement le potentiel de renouveler les fondations de notre système monétaire et plus largement la façon dont nous échangeons de l’information et de la valeur sur internet.
Quelles sont les innovations technologiques les plus importantes de la dernière décennie ? Je pense qu’il s’agit de l’iPhone, d’AWS et de Bitcoin. 
Quel est le rapport entre ces trois technologies ? 
Elles permettent aux entrepreneurs de les exploiter pour construire des produits par-dessus. D’exprimer leur créativité de manière radicalement moins chronophage. Ce sont des innovations de base sur lesquelles se greffent des grappes d’applications. Bref, les inventions radicales et transformatrices sont celles qui permettent aux gens de libérer leur créativité.
Des milliers de développeurs ont recours à l’App Store pour lancer des applications qui changent la vie des gens. Les startups ont réduit considérablement leur coût d’hébergement grâce à AWS. Bitcoin et Ethereum sont des « Settlement networks » qui rendent possible le lancement d’applications comme la monnaie, les NFT, les protocoles DeFi ou les identités décentralisées. 
Ces trois inventions ont libéré la créativité d’une génération d’entrepreneurs. Grâce à elles, nous avons obtenu une quantité incroyable d’innovations. Uber et Tinder avaient besoin de la géolocalisation du smartphone. Snapchat, Instagram et TikTok, d’un appareil photo intégré. Une valeur considérable a été produite indirectement grâce à la sortie de l’iPhone. 
En 2006, on vous aurez pris pour un fou si vous disiez que grâce à AWS, des entrepreneurs pourraient créer et héberger en quelques heures des applications pour partager des photos de pieds. Et pourtant.
Une fois que l’on a compris le potentiel de libération des innovations de base, nous pouvons parler de Bitcoin et de la blockchain. Bien sûr, comme le montre ce dernier exemple, il faut être conscient que nous ne pouvons très probablement pas prévoir toutes les applications qui seront engendrées par cette technologie de base. 
Il s’agit donc de déterminer si la crypto est une innovation fondamentale au même titre que les précédentes. En fait, toutes les applications « web3 » ou crypto résultent de la technologie blockchain (ou plus exactement d’un serveur d’horodatage décentralisé pour reprendre les mots de Satoshi).
C’est l’intégration de cette technologie à un système économique cohérent qui permet l’exécution d’applications décentralisées. Tant que la blockchain sera fonctionnelle, ces applications continueront d’être exécutées. Décentralisées, car elles fonctionnent partout et en même temps. 
Bien sûr, toutes les blockchains n’offrent pas le même degré de décentralisation. Il s’agit souvent d’un arbitrage avec d’autres variables comme la scalabilité ou le niveau de sécurité. Solana n’est pas Ethereum, qui n’est pas Bitcoin.  
Il semblerait donc que la blockchain et en particulier celles qui offrent le plus haut niveau de décentralisation, c’est-à-dire Bitcoin et Ethereum soit une innovation de base capable de libérer la créativité.
Le premier cas d’utilisation, le plus révolutionnaire et celui qui doit retenir toute notre attraction : la possibilité d’avoir une monnaie non-inflationniste.
Face au problème de l’inflation, deux applications se distinguent et apportent des réponses différentes : Bitcoin et les stablecoins. Elles offrent la possibilité d’acquérir un actif monétaire plus ou moins dur, de manière entièrement numérique, partout sur la planète. La différence principale entre ces deux actifs repose sur le degré de confiance.
Pour l’instant, force est de constater que les stablecoins sont bien plus désirés que bitcoin pour leur proposition d’être une couverture contre l’inflation.
La thèse maximaliste repose sur l’idée que l’Amérique va s’effondrer et emporter dans sa chute le dollar. Manifestement, l’Amérique est encore debout et le billet vert demeure l’actif le plus désiré en période d’incertitude financière. Le cœur de la thèse d’investissement : le monde va passer d’un standard dollar à un standard bitcoin ne se matérialise toujours pas.
Avec Bitcoin, vous n’avez plus à faire confiance à une institution gouvernementale qui décide arbitrairement de la politique monétaire. Bitcoin, cet actif dont la rareté est absolue et qui supprime la confiance envers l’Etat dans la production monétaire. Le désir ardent d’affirmer le droit de propriété des individus face à cet impôt invisible qu’est l’inflation.
Il faut néanmoins admettre que cet usage purement monétaire enthousiasme peu de monde en Occident. En dehors des quelques milliers d’anarcho-capitalistes qui lisent Ayn Rand au petit-déjeuner et des collapsologues qui prophétisent l’effondrement monétaire toutes les semaines, les gens sont surtout intéressés par le prix.
En dehors de l’Occident, les gens sont contraints de trouver des alternatives monétaires plus saines. Mais visiblement ils préfèrent utiliser du dollar américain en détenant des USDT. Ce comportement est totalement compréhensible quand on voit l’évolution du prix du BTC. Quand on est Michael Saylor, il est facile de dire à des vénézuéliens de transformer toutes leurs économies en BTC et de croiser les doigts.
Par ailleurs, la monnaie est un objet beaucoup trop complexe pour intéresser les gens. On y prête attention que lorsqu’on est confrontés à une hyperinflation, ce qui est fortement improbable en Occident. (Non, nous ne sommes pas à l’aurore d’un nouvel épisode de Weimar. Ceux qui racontent ces histoires veulent souvent vendre des formations).
Changer la nature de la monnaie est un problème qui dépasse la question technologique. C’est un problème multifactoriel avec des intrications sociales, psychologiques et politiques. C’est d’ailleurs pourquoi, Bitcoin a urgemment besoin de marketeurs hors-pair, d’artistes, voire même de leaders charismatiques (si possible poètes) pour engendrer le changement. Un changement de civilisation et de systèmes de valeurs, bien plus qu’un changement de techniques monétaires.
Si les argentins préfèrent l’USDT au BTC, c’est parce que la propriété fondamentale d’une monnaie doit être de conserver sa valeur à court terme. C’est-à-dire à offrir un pouvoir d’achat exprimé en termes de bien réels relativement stable sur un horizon temporel assez court.
Oui à long terme, bitcoin a tendance à s’apprécier, mais une monnaie est d’abord et avant tout un médium d’échange qui doit conserver sa valeur sur de courtes périodes de temps. C’est la raison pour laquelle bitcoin est encore un échec sur la promesse de refuge contre l’inflation.
A ce stade, il est donc plus probable de voir les stablecoins comme l’USDC ou l’USDT répondrent au besoin de monnaie saine des pays pauvres. Alors certes, chaque année plus de dollars sont injectés dans l’économie, mais il n’en demeure pas moins que ça reste une bien meilleure solution que d’avoir du peso argentin. Grâce aux stablecoins, n’importe qui dans le monde peut envoyer n’importe quel montant de dollars ou d’euros, à n’importe quel moment et pour des frais modiques.
Il s’agit déjà d’une très belle innovation monétaire crypto qui changera la vie de dizaines de millions de personnes dans le monde.
Certes, il est pour l’instant très difficile d’utiliser des stablecoins pour acheter des biens dans le monde réel. Mais cette problématique est essentiellement liée à leur forte précocité. Avec le temps, des sociétés comme Circle ou Stripe supprimeront ces frictions et développeront de nouveaux cas d’usage comme le streaming monétaire.
Les entreprises qui acceptent des cartes de crédit doivent payer des frais de 3 à 4 % à des sociétés comme Visa ou Mastercard. Il s’agit d’une taxe insupportable pour de nombreux commerçants. Des solutions comme bitcoin (au travers du Lightning Network) ou les stablecoins pourraient remédier à ce problème.
Grâce aux stablecoins ou à Strike, il est possible de supprimer cette taxe insupportable. Dans ce cas précis, la crypto a un véritable intérêt qui est d’augmenter les marges des commerçants en s’attaquant à la rente de Visa.
Avec l’arrivée des layers 2 (Polygon, Starkware, Lightning Network), les transactions deviennent beaucoup moins coûteuses. Il devient alors possible de déplacer des flux monétaires 24/24 et 365/365. L’idée d’une paie mensuelle pourrait alors devenir rapidement obsolète. Après tout, il y a un coût caché à devoir attendre pour recevoir son salaire. Certains ménages recourent à des prêts à la consommation pour finir les fins de mois et subissent un stress financier conséquent.
Voilà ce qu’on peut lire sur certains blogs cryptos.
« Demain, nous surferons tous sur des réseaux sociaux décentralisés. Des plateformes au service des utilisateurs, gouvernées par des DAO. Chaque réseau social aura son propre token. METACOIN, TWITTERCOIN …Toutes nos photos seront des NFT. Nous serons alors des utilisateurs libres et joyeux. »
Prenons l’exemple des réseaux sociaux. Ce sont des plateformes qui fonctionnent parfaitement sans blockchain. Nul besoin de préciser que les gens n’éprouvent aucun intérêt pour les sujets de privacy. Ce n’est pas un argument suffisamment solide pour subir le coût de changement de plateforme.
S’il semble clair que tous nos réseaux sociaux ne finiront pas sur des blockchains (une architecture extrêmement lourde et peu efficiente), il convient de se demander quelle valeur pourraient-elles susciter.
Avant tout, dans des domaines où il y a une véritable souffrance. Par exemple, la souffrance de perdre le contrôle de sa communauté suite à une décision de déplateformisation.
Depuis quelques années nous assistons à l’émergence d’un nouveau modèle économique sur les réseaux sociaux. Autrefois, les influenceurs devaient faire des millions de vues pour espérer générer un revenu (Youtube, Instagram…).
Mais en 2022, les fans veulent de l’intimité et une relation authentique avec les créateurs de contenu. Pour obtenir ce lien privilégié, ils sont prêts à verser une somme fixe tous les mois dans le cadre d’un abonnement. Onlyfans, Mym, Patreon, Twitch… Tous ces réseaux intègrent la possibilité d’accéder à du contenu exclusif et monétisé.
Les créateurs de contenu qui ont parfois pris des années à se construire une communauté sont toutefois tétanisés à l’idée de perdre le fruit de leur travail. Après tout, s’ils perdent leur communauté en raison d’une décision arbitraire émanant de la plateforme, alors ils perdent leurs revenus. Les plateformes peuvent également changer leurs conditions tarifaires du jour au lendemain. Des solutions comme Onlyfans prélèvent des frais de 20 % sur les abonnements, ce qui n’est négligeable.
Toute cette incertitude génère un stress conséquent. Les NFT pourraient atténuer cette souffrance en offrant la possibilité de « posséder sa communauté » et de pouvoir la déplacer à tout moment. Aucune plateforme ne peut vous confisquer vos fans et vous empêchez d’établir des transactions commerciales avec eux. Avec les NFT, les créateurs de contenu peuvent aller très loin dans la personnalisation des abonnements et les fans qui soutiennent un créateur depuis le début peuvent tirer des bénéfices.
Voilà pourquoi je pense que le principal cas d’utilisation des NFT portera sur la passion economy et transformera en profondeur le modèle des abonnements. Et puis, je trouve que ça s’inscrit très bien dans la philosophie cypherpunk : supprimer les obstacles au marché libre entre des acteurs volontaires.
Grâce aux protocoles de prêts décentralisés, il est possible d’emprunter des dollars contre des ETH. Sans avoir à signer de documents de prêts ou à vérifier la solvabilité de l’emprunteur.
Il s’agit d’une application très intéressante, mais sa principale limite est liée à sa conception. Dans le monde réel, l’Etat, détenteur du monopole policier assure au banquier que si vous ne remboursez pas votre prêt, alors il pourra, à travers une action juridique vous pourrir la vie jusqu’à ce que vous cédiez.
Sur une blockchain, aucune force de coercition n’est en mesure de vous mettre un couteau sous la gorge. Vous êtes donc contraint de déposer un collatéral important en crypto, supérieur au montant emprunté. Par exemple, il n’y a pas de possibilité d’hypothéquer sa maison pour emprunter de l’argent. Tout simplement parce qu’une maison est un bien physique. Même si vous échangez un « droit de propriété numérique » via une blockchain, l’Etat devra toujours garantir l’application du droit des contrats.
Le principe de prêt décentralisé est donc séduisant, mais ne concerne que les personnes qui détiennent une fortune en crypto. Au fur et à mesure que les protocoles introduiront des biens du monde réel sur la chaîne comme garantie, alors la décentralisation reculera, mais l’utilité grandira. C’est tout le paradoxe de la DeFi.
Cette ardente nécessité de la surcollatéralisation des prêts DeFi est également à l’origine de la grande fragilité des protocoles. Que ce soit dans le monde physique ou sur une blockchain : prêter de l’argent qui a été prêté augmente le risque d’effondrement du système.
La crypto est encore dans une phase précoce où les projets bullshits sont légion. Elle a néanmoins un véritable intérêt pour réformer les fondations de notre système financier. Puisque nous sommes encore dans une phase embryonnaire, il convient de réviser régulièrement nos jugements. « Les personnes qui ont souvent raison écoutent beaucoup et changent souvent d’avis » comme l’exprimait Jeff Bezos.
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Les propos et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leur auteur, et ne doivent pas être considérés comme des conseils en investissement. Effectuez vos propres recherches avant toute décision d’investissement.
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